Les lettres de Bastet 7
Posté le 19/07/2020
Coucou tout le monde,
Eh ! Ben, voilà ! Nous n’avons pas pu prendre l’avion pour cause de re confinement dans le pays natal de Bethsabée. Je ne vous l’avais pas dit, mais avant de devenir l’ange gardien en chef de Dena, Bethsabée fut son âme-sœur sur terre, voilà ça c’est fait aussi.
« Ce n'est pas la fin du monde, on ira plus tard » elle a dit ma stray cat humaine. Ce que j’apprécie chez elle, c’est qu’elle va toujours à l’essentiel. Elle ne s’embobeline pas dans les jérémiades. C’est comme lorsque les gens parlent de refaire sa vie. Elle répond invariablement : « On ne refait pas sa vie, on la continue différemment, c’est tout».
A propos de re confinement, voilà qu'il faut ressortir les masques chez nous aussi. Je ne sais pas de quoi ça protège exactement, si ce fameux virus est dans l'air, voire à s'en baigner dans l'eau non potable, mers, lacs et ruisseaux y compris, sans doute ?...
Bref, Dena a vécu une Expérience de Mort Imminente quand elle était gamine ; ça explique qu’elle se passe très bien du référentiel de valeurs prescrit en fonction du milieu social. Pis, faut pas lui venir avec des bondieuseries à deux balles, sinon elle vous envoie compter les cloches qui sont restées à Rome !
Donc, moi j’aime vivre près d'elle, parce qu’elle évolue dans un univers paisible serti de moments d’éternité. Horus adorait cette vie-là, lui aussi. D’autant plus que la sienne, avait démarré dans la rue quand il était tout petit. Tiens ! Puisque vous aimez me lire, je vais vous raconter l’histoire de notre Horus telle qu’il me l’avait confiée.
C’était un magnifique matou noir portant plastron blanc. Pendant sept ans, sa vie fut celle d’un chat errant. Sauf, qu’Horus n’était pas un matou bagarreur du tout. Ni les félidés caïds du cimetière, ni ceux des entrepôts de la gare, et pas plus les intempéries que les coups de pied, ne l’avaient aigri. Parce que mon cher Horus n’a jamais perdu l’espoir de trouver la bonne maison, et il a eu raison.
Un jour d’automne, une brave dame copine avec le refuge des chats du cru, l’avait ramené chez elle. Mais elle avait plein de chats et vivait de surcroît, au troisième étage ! Horus n’était pas vraiment heureux là-bas et pas du tout enclin à partager la litière de la bande, voyez. Il fallait donc qu’elle le descende dans la nature dans ses bras pour ne pas risquer de tomber dans les escaliers, car elle le mettait en laisse le temps qu’il se soulage.
Quelques jours plus tard, cette dame a dû se faire opérer de l’épaule. Le refuge a donc recueilli Horus. Dans le même temps, ces gens avaient fait la connaissance si je puis dire, car ils se fichaient bien de connaître sa vie, de Dena. Ce qui les intéressait, c'était de se débarrasser d'un vieux matou nommé « Zorro » qui était en fait le futur Horus.
Bref, voilà qu’un jour d’avril 2009, Dena a vu un Kangoo se garer devant chez elle, et deux femmes en descendre avec une cage. Arrivée sur la terrasse, elles ont posé la cage à terre et en ont ouvert la porte. Le beau matou qui se trouvait à l’intérieur, a d’abord vu les fleurs et son cœur s’est mis à battre très fort, car il adorait les fleurs. Puis il a cessé de stresser complètement, quand son regard a croisé celui de Dena.
Il a tout de suite aimé la pensée qu’elle lui a envoyé à ce moment-là et qui était : «Va donc faire le tour du propriétaire et dis-moi si les lieux te conviennent ». Parce qu’il n’était pas un rustre de nature, il s’était gardé de bondir à l’intérieur pour découvrir le logis espéré depuis tant d’années. Il en a fait le tour avec certaine grâce. La surprise fut de trouver préparé rien que pour lui, croquettes, eau fraîche et terrine.
Il a goûté à tout ça, s'en était même délecté je dirai et puis, il a fait le tour des pièces et il est ressorti humer les fleurs. Ceci fait, il se tenait près de la porte donnant sur la sente et Dena lui a dit : « Bien sûr que tu peux, va et prends ton temps »… Alors, il est allé faire le tour de la résidence. Là, il y avait des arbres, de la verdure en veux-tu, en voilà ! Et, un peu plus bas, la grande bleue qui roule ses vagues. Il est revenu enchanté de sa balade et s’est installé sur le coffre de jardin dans l’espoir qu’on l’y laisserait.
Les femmes du refuge ont alors fait signer un formulaire à Dena, et elles sont reparties avec leur cage vide. Ouf ! la patience d'Horus était enfin, récompensée. Un peu plus tard, Dena s’affairait près du coffre de jardin sur lequel Horus se détendait. Il l'observa quelques minutes, puis prenant son courage à quatre coussinets, il s’approcha d’elle pour frotter son front contre le sien.
Et puis, un matin, alors qu’il prenait le soleil, elle l’a appelé « Horus ». Il en fut très ému et lui a jeté un regard rempli de reconnaissance. De ce jour, il la suivit pas à pas, conversant avec elle autant en miaulant que télépathiquement parlant.
Quelques mois plus tard, je suis arrivée chétive et rejetée par de mauvais humains, moi aussi. Horus a été un peu jaloux de ma présence au début. Il en avait même dormi dehors. Mais au bout de trois semaines, quand il m’a vue rentrer avec un bandage sous le ventre, il est revenu pour me câliner et nous ne nous sommes plus quittés, jusqu’à ce qu’il gagne le paradis.
Sincèrement, autant il a été un matou heureux, je suis une chatonne comblée. J’ai eu le bonheur d’être aimée d’Horus et j’ai celui de l’être de Dena. Que demander de plus à la Vie ? Le vrai luxe, n'est-il pas de tenir debout tout seul, d'aimer et d'être aimé(e) et de manger à sa faim tous les jours ?
Nous deux, ma coloc' humaine et moi, nous vivons dans un little home douillet et nous n'avons aucunement besoin d'afficher des signes de richesse extérieure. Je dis "nous", car il existe aussi des chats et des chiens affublés de colliers en or avec des pierres précieuses.
Nan, moi j'ai pas de collier. Tout le monde sait que je suis la chatonne de Dena, parce que je l'accompage partout dans le quartier, comme je le faisais avec Horus d'ailleurs. Elle n'a pas eu besoin de nous apprendre à la suivre. C'est naturel chez nous quand on respecte notre nature. L'amour quant à lui est universel, il n'est pas l'apanage des humains. D'ailleurs nous, nous vous aimons que vous soyez de condition modeste ou aisée. Pouvez-vous en dire autant concernant la tendresse que vous témoignez à vos congénères ?...
Maintenant, il est l’heure de dîner et vu le fumet de la terrine qu’elle m’a servi ma stray cat humaine, je vais me défoncer les papilles avant de me rouler en boule contre elle. Je me l'aime très fort et elle me le rend bien.
A bientôt tout le monde, prenez bien soin de vous et rappelez-vous, il n'y a rien au-dessus de la tendresse qui ne vous demande pas l'impossible.
Votre dévouée
Bastet
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